Emile Parisien Quartet – Jazz Station

Il y a des musiciens chez qui la musique traverse tout le corps. Physiquement.

Emile Parisien est de ceux-là. Indéniablement.

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Il faut le voir se tordre sur scène, se débattre avec son soprano, se mettre sur la pointe des pieds, accompagner les moindres nuances musicales de circonvolutions presque erratiques.

Ce vendredi 8 mars au soir, il était à la Jazz Station pour présenter son dernier album avec son quartette «nouvelle formule». A la contrebasse, il y a toujours les fidèles de la première heure, Ivan Gélugne à la contrebasse et Julien Touéry au piano, mais c’est dorénavant Julien Loutelier qui tient les baguettes à la place de Sylvain Darrifourcq.

Le fantastique album Double Screening est sorti chez ACT très récemment et Emile Parisien en a vendu tellement lors des concerts précédents qu’il ne lui en restait plus qu’un seul. (Rassurez-vous, vous pouvez encore le trouver chez votre disquaire favori).

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Ce soir, c’est un seul et long set. Intense et excitant de bout en bout. Généreux. Joyeux aussi, car le saxophoniste français a du charisme, le sens du contact et du partage.

Le quartette équilibre les moments très contemporains à d’autres plus enracinés dans jazz presque traditionnel. Le swing sous-jacent est régulièrement cassé, interrompu ou éclaté par des fulgurances improvisées, presque free, ou par des structures très travaillées. Mais ces «brisures» ne font que mieux relancer la machine.

Les morceaux semblent parfois se construire par eux-mêmes. A l’endroit, à l’envers, placées ou déplacées, les pièces du puzzle se mettent en place petit à petit, presque naturellement. C’est flagrant sur «Hashtag 1, 2, 3 et 4» construit, vous l’aurez deviné, en plusieurs mouvements. Et c’est fabuleux du début à la fin.

Julien Touéry explore le cœur et le corps du piano. Il colle du «tape» sur certaines cordes, s’obstine à ne jouer que sur une partie du clavier avant de s’étendre sur son entièreté avec fougue.

Ivan Gélugne est aussi habile à l’archet qu’en pizzicato. Il ondoie, s’insinue, propulse. Julien Loutelier, quant à lui, utilisant moins de «gadgets» et jouant peut-être moins «rock» que son prédécesseur, impose une tension souple et constamment groovy.
Mais ce qui frappe surtout dans ce quartette, c’est la complicité infaillible qui existe entre eux. La musique n’est peut-être pas aussi complexe qu’on pourrait le croire (quoique), mais elle est tellement riche, surprenante et pleine de rebondissements que nos quatre musiciens se doivent d’être attentifs pour la rendre aussi fluide que possible. De ce point de vue-là (aussi), on est subjugué.

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Il suffit d’écouter ces «stop and go» hyper brefs, nerveux, presque irréguliers, sur «Malware Invasion» par exemple, ou ces courts exercices de styles qui se promènent sur les différentes miniatures «Spam». Oui, on s’amuse. On s’amuse vraiment.

Le son d’Emile Parisien est clair, limpide et précis. Le saxophoniste injecte, par bribes, des débuts de mélodies qu’il laisse en suspens (sur l’intense «Double Screening 2», par exemple) ou étire, avec volupté et une pointe d’orientalisme, un chant plaintif («Elegie pour carte mère»).

C’est une musique très en place, qui ne tient pas en place ! Une musique détonante et, par instant, très swinguante. Le quartette d’Emile Parisien réussi le grand écart (et triple salto arrière) avec une classe et un savoir-faire indéniables.

Le groupe n’était jamais venu jouer à Bruxelles depuis qu’il existe. Dix ans !

Espérons qu’il ne faille pas attendre encore autant d’années pour les revoir à nouveau dans la capitale. Non sommes le pays du surréalisme, mais quand même…

A+

Merci à © Roger Vantilt pour les images.

 

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