Walden Festival 2023

Le Walden Festival en est à sa deuxième édition. Initié par le Klara Festival, dédié principalement au classique, le Walden a décidé d’élargir son programme et de s’ouvrir à d’autres musiques. Mélange des genres, mixité, fusion, voilà bien ce qui caractérise notre petit pays et plus encore notre capitale (la deuxième ville la plus cosmopolite au monde, après Dubaï, où près de 180 nationalités s’y côtoient).

Entre le Brussels Philarmonic et Lorenzo Gatto, le Collegium Vocale Gent, Joep Beving et autres Trio Joubran ou Meskerem Mees, il y avait quelques jazzeux que le mélange stylistique n’effraie pas.

Dans le très beau jardin du Musée des Sciences Naturelles, près du parc Léopold, Aleph Quintet est déjà sur scène. Il est quatorze heures, il y a quelques gouttes de pluie, mais le soleil est radieux (la Belgique n’est pas à un paradoxe près).

Emmené par Akram Ben Romdhane au oud et Théo Zipper à la basse électrique, le quintette (qui a sorti un excellent premier album chez Igloo) propose son jazz singulier fortement épicé aux musiques orientales. « Désirs », « Peace » ou « Let’s Move » laissent le champ libre aux improvisations et à des échanges tantôt mélancoliques, tantôt musclés. Marvin Burlas, au violon, répond avec fougue aux invitations du oud. L’ensemble monte vite en intensité tout en gardant les subtilités et les nuances d’une musique à l’architecture complexe. Au piano, c’est Simon Groppe qui a pris la place de l’habituel Wajdi Riahi. On n’y perd pas au change. Groppe se lance plus d’une fois dans des solos incendiaires, virtuoses et expressifs. Maxime Aznar, aux drums, joue avec les métriques, adoucit les ferveurs et fait claquer les fûts quand il faut. Aleph Quintet évite tous les clichés et offre une véritable fusion des cultures et ça fait un bien fou. Je pense que le groupe n’a pas encore fini de nous étonner.

Direction le Théâtre Senghor où se produisent le saxophoniste (soprano) Émile Parisien et l’accordéoniste Vincent Peirani. L’exceptionnel duo revisite à sa façon le tango (ou presque) avec liberté et une incroyable inventivité. Cela fait plus de dix ans que les deux musiciens parcourent la planète en tous sens. Ils ont plus de mille concerts au compteur, c’est peu dire qu’ils se connaissent par cœur. La complicité et évidente et l’humour trouve toujours une place entre la virtuosité et l’émotion. Le dialogue est éblouissant sur « Temptation » ou « Fuga I Misterio ». Les improvisations et les figures précises se mélangent avec une désinvolture réjouissante. Le duo mélange les intentions et les sentiments, tantôt festifs, tantôt introspectifs, avec une maestria édifiante. Emile Parisien se tortille, repousse du pied derrière lui sa chaise, danse sur des airs fiévreux. Vincent Peirani fait souffler son accordéon sourdement, puis le fait crier, gémir, rire. On est subjugué. Et on s’enivre une dernière fois avec « Nouchka » et ses longs solos sinueux, pleins de folie et de mystères. Magnifique duo. Fabuleux concert !

Sous le soleil, on se balade dans le parc en tendant l’oreille ici ou là aux différents concerts avant de rejoindre la petite et intime salle du Lycée Jacqmain. Ici, c’est le guitariste Julien Tassin qui se produit en solo. C’est son troisième concert de la journée. Comme il improvise à partir de thèmes assez simples (c’est lui qui le dit), il trouve toujours de nouveaux chemins, inspirés par l’ambiance et les musiques qu’il a entendues durant la journée ou par l’énergie ou la concentration du public.

Pieds nus et guitare acoustique sans aucun artifice, Julien Tassin s’appuie sur le blues et la folk pour vagabonder. Parfois il chantonne. Parfois la musique prend de la vitesse, se charge de passion, puis redevient minimaliste, élégiaque, dépouillée. Julien Tassin cherche les sons et la résonance, sur les cordes mais aussi sur la caisse de sa guitare. Tout est douceur et poésie, abstraction aussi, parfois. Tenir en haleine un public en solo n’est pas chose aisée mais Julien y parvient bien au-delà des attentes. Chapeau.

On ressort le cœur léger et l’esprit apaisé.

Alors, on profite une dernière fois du parc et des musiques et l’on se promet de revenir l’année prochaine.

A+
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