Vincent Thekal Trio à la Jazz Station

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Le saxophoniste  Vincent Thekal vous prend en douceur. Il vous installe dans un certain confort et développe avec ses complices ( Alex Gilson à la contrebasse et Franck Agulhon à la batterie), un «After The Storm » à la fois intrigant et rassurant.

Et puis, une fois qu’il a toute notre confiance, il balance un Monk. Presque sans prévenir. « Mysterioso » est plus un prétexte à l’improvisation débridée et la source d’un embrasement hard bop fulgurant, qu’à une simple revisite. C’est malin et c’est bluffant.

Le saxophoniste passe les paliers, enchaine les chorus, va jusqu’à la rupture. Ses yeux fixent obstinément un horizon imaginaire, on le sent habité par sa musique. Il est dans son monde. Les longues partitions étalées sur le pupitre (la plupart de ses arrangements sont quand même complexes et finement ouvragés) ne lui servent à rien. Ou alors elles sont là, peut-être, simplement pour le rassurer, au cas où… Mais sa musique est de toute façon trop organique pour qu’elle ne le perde en chemin.

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« Saint-Josse » s’engage plus ou moins dans la même veine énergique. On y ressent de la rage et un besoin irrépressible de liberté. En soutien – et bien plus qu’en soutien – Vincent Thekal peut compter sur le drumming acéré de Franck Agulhon. Le time du batteur est juste parfait. Et puis, il y a aussi son groove, sa souplesse, son écoute, ses relances… tout y est ! Cela paraît simple, mais c’est d’une rigueur et d’une limpidité imparables. Alex Gilson n’est pas en reste. Le son est ample et colle au plus près de la mélodie et des tempis. Ses duos avec le batteur sont électrisants. Toute l’énergie y est concentrée. Rien ne se perd, rien ne se dilue.

Alors, pour nous détendre – tout en gardant toute notre attention – le trio glisse un « For All We Know » qui rappellerait presque un certain Prez. Thekal n’a rien oublié de la tradition et s’en sert pour livrer un jazz bien actuel.

Le trio est soudé et la complicité est palpable. On s’écoute, on dialogue, on échange. La hiérarchie s’estompe au profit du groupe. Personne n’oublie personne. Cette cohésion et ce respect mutuel rejaillissent sur la musique : elle vit, évolue, chante, surprend.

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« Origami », le titre éponyme de l’excellent album sorti récemment sur Hypnote, nous propulse rapidement dans un jazz plein de rebondissements, de fougue, de brèves accélérations, d’éclatements soudains. « Today’s Opinion » suit la même démarche mais avec d’autres arguments. Monk plane sur cette musique ainsi que tout son esprit aventureux. Le trio explose d’ailleurs « We See », de Thelonious, avec délectation et intelligence. Le maître aurait apprécié. Wayne Shorter aimerait aussi la façon dont Thekal et ses amis reprennent « Juju » et Chick Corea serait surpris d’entendre son « Windows » traité de la sorte.

Thekal a tout compris. Son jazz n’est pas passif, il ne se laisse pas faire, il se débat, il grandit au fil du concert, il prend de la force et du corps. Et il ne finit pas de nous enivrer. On croit le connaître mais il nous ébahit encore et toujours. Quel plaisir !

Ce soir, à la Jazz Station, ce n’était pas une démonstration, c’était une évidence : le jazz ne finira jamais de nous surprendre. Et le surprises, surtout quand elles sont bonnes, on adore ça.

A+

 

 

Merci à ©Roger Vantilt pour les images.

 

 

 

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